BIM, du bâtiment aux Infrastructures : le SIG en point de rencontre


Carte Blanche à Alain Maury, architecte et Délégué général de l’association Mediaconstruct, chapitre francophone de BuildingSMART International en charge d’un ensemble de normes relatives à la maquette numérique (dont l’ISO-IFC).



Alors que l’industrie du BTP n’est pas restée passive face à la généralisation du numérique, le domaine des Infrastructures n’a pas progressé à la même vitesse pour des raisons autant d’ordre technique que structurel. Mais le contexte qui évolue pousse à investir sur les formes de représentation et d’évolution des bâtiments dans leur environnement spatial et social.

D’abord, le bâtiment en tant que modèle doit être intégré dans son environnement et apparait comme une partie d’un modèle plus vaste. Ensuite, le cycle de vie des infrastructures, supérieur à 50 ans et qui inclue maintenance et démantèlement, oblige à une prise en considération dès la conception. Enfin, les avancées des technologies de l’information permettent d’envisager une approche globale des objets à construire ou à gérer, que ce soit sur le plan géographique,  géométrique et patrimoniale.

D’ailleurs, d’après la directive européenne 2007/2/CE INSPIRE du 14 mars 2007, la Communauté Européenne doit se doter d’une structuration d’information géographique pour répondre aux politiques environnementales. Ceci entraine l’obligation suivante : mettre à disposition des données sous format électronique répondant aux normes internationales. Or, certaines échelles et domaines concernés par cette directive se superposent aux échelles et domaines couverts par les projets d’infrastructure.

En France, l’approche de la modélisation des infrastructures et du travail collaboratif s’est concrétisée par la réalisation d’un projet de recherche Communic, terminé fin 2010 et  qui a donné suite au projet MINnD démarré début 2014. Le but affiché : mettre au point des formats d’échanges applicables aux infrastructures durables, en y adressant le cycle complet de vie des données,  conçues et manipulées, pour assurer la pérennité du « tout numérique ». Cet objectif oblige donc d’associer tout le secteur du BTP au développement de l’interopérabilité et du BIM pour les infrastructures.

Ce projet national, labellisé par le Réseau Génie Civil et Urbain (RGCU) du ministère du Développement Durable fait écho à l’initiative internationale OpenINFRA. À la demande de BuildingSMART International (l’association œuvrant pour la mise au point d’outils et méthodes nécessaires à l’utilisation du BIM dans le monde), le projet OpenINFRA doit développer l’interopérabilité des modèles et des formats d’échanges dans les projets d’infrastructures, pour gérer des données dans le temps et garantir de leur cycle de vie. Cette démarche répond à la demande de nombreuses administrations dans le monde qui introduisent dans leur réglementation l’obligation de fournir non plus des plans, mais des informations numériques structurées. Le projet OpenINFRA devenu l’INFRAroom, est conduit par un représentant de Mediaconstruct, Christophe Castaing, par ailleurs Directeur de projet chez Egis, et fait de la France est un des leaders en la matière.

Enfin, appliquer des normes apporte des solutions à des problèmes d'échanges de données dans le cadre du SIG et du bâtiment (CAO). Les formats LandXML et CityGML répondent à certains besoins pour les projets d’infrastructures, mais ils ne sont pas suffisants. Des travaux sont en cours afin de créer un format standard d’échanges d’informations similaire aux IFC pour les infrastructures. Ainsi, sur le plan international, le SETRA, le CSTB et quelques acteurs privés, concourent au développement des IFC Bridge, sorte d’extension du modèle IFC aux échanges de données de conception des ouvrages d’art.

Nous savons que la limite majeure de la maîtrise du BIM dans le bâtiment est justement de ne parler que du bâtiment. La notion d’infrastructures durables est la problématique principale des 20 prochaines années ! La concentration urbaine va voir l’apparition de super-mégapoles, impliquant la construction et l’exploitation des infrastructures qui en découlent. Citons les exemples du Grand Paris ou du Crossrail à Londres. La ville doit donc être envisagée au travers des systèmes qui la font et la gèrent. Le SIG en est un primordial. Cependant, il faut insister :  l’un des points clés de la durabilité sera de garantir l’interopérabilité des informations par-delà les outils. Les infrastructures urbaines, mais aussi industrielles, rassemblent tous les acteurs du domaine. L’objectif est de faire progresser l’ensemble du secteur dans l’interopérabilité et la structuration des informations afin d’anticiper le développement de ce marché colossal et disposer, à terme, des outils nécessaires pour y répondre.



Carte blanche publié dans SIGMAG de juin 2014
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Article mis en ligne par Xavier Fodor - SIGMAG SIGTV.FR